Humanity On Trial : lorsque sauver des vies humaines devient un crime

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Humanity On Trial est un documentaire réalisé par Jonas Brunn en 2019 et est l’un des lauréats à la compétition internationale de documentaire du festival des libertés 2021, organisé par Bruxelles Laïque.

Un documentaire très captivant et touchant, que je vous conseille vivement, s’inscrivant à l’actualité avec l’affaire de Sean Binder et Sarah Mardini en Grèce accusés des mêmes crimes que Salam Aldeen.

Retour sur « Humanity On Trial » :

Ce film suit l’histoire de Salam Aldeen, jeune humanitaire danois membre fondateur de la Team Humanity qui, pour avoir sauvé des vies de migrant.e.s au bord des côtes grecques, est accusé injustement par les autorités helléniques de trafic d’êtres humains. Salam, bien qu’il risque la peine de prison à perpétuité et bien que sa famille lui manque, n’abandonne pas son combat et lutte avec acharnement contre les autorités grecques qui lui font obstruction à chaque fois qu’il en est possible.

À travers ce documentaire, la première chose qui nous submerge est l’empathie qu’on est obligé.e.s de subir en assistant aux conditions déplorables de ces enfants, séniors, femmes et hommes, affamé.e.s et assoiffé.e.s. La plupart n’ont jamais nagé de leur vie, et ont, pendant des jours, traversé vents et marées dans une mer houleuse au sein d’une barque en plastique. Comment, sauf si nous ne sommes pas humain.e.s, ne pas se sentir mal en voyant de tels images ? Et tout cela dans le but de pouvoir s’offrir à eux et elles-mêmes et à leurs proches un avenir bien plus radieux que ce que leurs pays d’origine peuvent leur offrir.

Le documentaire retrace aussi le parcours de vie de Salam Aldeen et ce qui l’a poussé notamment à créer sa propre organisation humanitaire, Team Humanity. Ce qui m’a beaucoup touché chez cet homme, c’est son dévouement acharné à sa cause. Dès qu’un bateau clandestin est repéré, il n’y a pas une seule fois où celui-ci n’accourt pas pour venir pour porter secours aux migrant.e.s. Le plus émouvant dans ces scènes du documentaire, est la crainte et l’angoisse que Salam ressent à l’arrivée d’un bateau clandestin, rongé par le fait de savoir si les migrant.e.s sont tous arrivé.e.s sains et saufs ou non. Une telle empathie et acte de solidarité ne peut laisser les spectateur.ice.s indifférent.e.s.

 

La solidarité, un crime passible de prison en Union Européenne ?

Enfin Humanity On Trial nous montre l’absurdité des plaintes retenues envers Salam Aldeen. Outre la lenteur et la nonchalance de l’administration judiciaire grecque, forçant Salam à rester bien plus longtemps que prévu sur le territoire, on se rend compte de l’hypocrisie des autorités. En effet, la police maritime a pendant longtemps coopéré avec les humanitaires de Team Humanity, avant de subitement retourner sa veste et de les accuser de manière totalement infondée de trafics d’êtres humains et d’organisation à but criminelles (ce sont à peu de choses près les mêmes chefs d’accusation portés envers Sean Binder et Sarah Mardini par la justice grecque).

Bien qu’à la fin du documentaire le juge ordonne le non-lieu de la poursuite par manque de preuves tangibles, ces accusations dévoilent surtout le visage politique de la Grèce notamment sur la question de l’immigration. Selon celui-ci, aider son prochain et sauver la vie de gens sont potentiellement passibles à présent de la perpétuité.

On assiste à travers toute l’Europe,petit à petit, à une criminalisation de la solidarité. En Grèce, les accusations entièrement illégitimes envers Sean Binder, Sarah Mardini, et Salam Aldeen nous donnent un aperçu clair d’une politique qui est en train de se mettre en marche, et pas uniquement dans ce pays. On peut notamment évoquer la situation de la France hésitant à accueillir l’Ocean Viking ou encore l’Italie de Giorgia Meloni s’attaquant aux ONG prêtant leur aide en mer aux migrants. Une politique anti-migratoire assassine complice du meurtre s’est installé partout en Europe. Et ce, en corrélation avec la montée de l’extrême droite dans le monde Occidental.

On oublie bien souvent qu’à la fin que ce sont bien nos sociétés qui décident de noyer ces personnes dans la Méditerranée, par son inaction et en appauvrissant les pays du Sud …

 

– Issa Hossain, membre d’écoloj. 

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