Rencontres avec deux figures de l’entrepreneuriat durable à Bruxelles

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Ces derniers temps, l’entrepreneuriat durable a la cote et les sociétés qui s’en rapprochent poussent comme des champignons. Curieux d’en savoir un peu plus sur ce qui les différencie des acteurs classiques de la production et de la vente, écolo j Bruxelles a organisé une rencontre avec deux interlocuteurs privilégiés dans ce domaine : Martin François, cofondateur de Permafungi et Alexandre Hervens, coopérateur chez Belgomarkt.

Permafungi, c’est une entreprise à finalité sociale qui produit et vend des pleurotes (et bientôt des chicons) cultivés dans des marcs de café aux particuliers et aux commerces, tout en mettant en place un réseau décentralisé de production de ces pleurotes dans tout Bruxelles et en organisant des séances de formation pour les Bruxellois. Cette entreprise constitue un parfait exemple d’économie circulaire : elle récupère ses marcs de café auprès de restaurateurs bruxellois afin de les transformer en substrats pour la culture de pleurotes. Cette valorisation à 100 % d’un déchet autrefois peu exploité a déjà permis de recycler 30 tonnes de marcs de café et de produire 6 tonnes de champignons. Son beau projet ne se limite pas uniquement à cela : Permafungi cherche à être le moins dépendant possible des énergies fossiles. La récupération des marcs de café et la livraison des pleurotes se font à vélo, et les pleurotes poussent dans des caves autrefois peu exploitées, qui ont l’avantage de maintenir une température constante. Ajoutons à cela, cerise sur le gâteau, la dimension sociale de l’entreprise : elle s’engage dans la réinsertion professionnelle d’une main-d’œuvre peu qualifiée et parfois au chômage depuis longtemps. Déjà auréolée de nombreux prix, dont le Sustainable Partnership Award (pour son partenariat avec EXKi et Färm notamment) et le Grand Prix des générations futures, Permafungi a encore de beaux jours devant elle : elle vient d’ouvrir une deuxième champignonnière dans les caves de Tour & Taxis !

Situé au 19 rue de Dublin près de la Place Dumon, Belgomarkt est un supermarché innovant avec pour objectif de faciliter l’accès à une consommation saine et responsable tout en redynamisant l’économie locale. La coopérative vise à constituer une vraie solution de rechange aux grands distributeurs, sans faire de compromis sur la qualité et l’accessibilité. À mille lieues des grandes surfaces traditionnelles, Belgomarkt ne vend presque que des produits cultivés et produits ou transformés en Belgique, soigneusement sélectionnés par les fondateurs. Les produits issus de circuits courts représentent 95 % de l’offre du supermarché. La suppression des emballages et des intermédiaires notamment permettent rendre le modèle viable sur le long terme. Soulignons également que les invendus sont systématiquement redistribués à des organisations caritatives pour éviter le gaspillage. Le succès de Belgomarkt est indéniable, il a même pris de court les coopérateurs : deux jours après l’ouverture au début de l’été 2016, le supermarché a dû temporairement fermer ses portes à cause d’une rupture de stock !

Ces deux projets s’inscrivent clairement dans une relocalisation de l’économie : pourquoi aller chercher ailleurs des produits que l’on peut trouver en Belgique voire produire soi-même ? Le projet de Permafungi s’inscrit dans l’agriculture urbaine, un mode de production indispensable dès aujourd’hui mais surtout dans le futur pour compenser la baisse de rendement des sols et l’augmentation de la population. En prônant la consommation de produits belges, Belgomarkt diminue la quantité de CO2 bêtement émises pour le transport de produits tout à fait disponibles en Belgique. Sur le plan écologique, le concept de « résilience urbaine » est particulièrement important, et il est d’ailleurs mis en avant par Permafungi. Il se définit comme « la capacité d’un système à absorber un changement perturbant et à se réorganiser en intégrant ce changement, tout en conservant essentiellement la même fonction, la même structure, la même identité et les mêmes capacités de réaction ». Deux projets bien distincts, mais une même philosophie : la planète et les gens passent avant le simple profit.

Cette rencontre inspirante aura été riche en enseignements. Bien des jeunes craignent encore de se lancer, de faire le pas vers le monde de l’entreprise. Pourtant, les deux interlocuteurs se sont vraiment accordés à dire qu’il ne faut pas hésiter à mettre sur pied un projet. Certains échouent, d’autres réussissent, mais le plus important c’est clairement de s’investir dans un projet personnel avec de l’enthousiasme et de bons partenaires. La Région bruxelloise soutient humainement et financièrement les projets bien ficelés. S’il n’y avait qu’une seule chose à retenir de cette rencontre, ce serait de se lancer, sans plus attendre ! De préférence dans l’entrepreneuriat durable évidemment tant qu’on y est, un secteur porteur et un terreau fertile à la mise en place d’un autre modèle de société. Alors, à qui le tour ?

Lucas Bernaerts

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