Élections en Espagne, résultats et enjeux d’un scrutin historique

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Élections en Espagne, résultats et enjeux d’un scrutin historique

Ce dimanche 23 juillet, se déroulaient les élections générales espagnoles. Le grand vainqueur ? Assez difficile à dire. Une chose est certaine : les sondages ont été totalement déjoués.

 

La droite ne parvient pas à récolter assez de sièges, la gauche fait encore mieux qu’en 2019

C’est le Parti Populaire (PP) qui a récolté le plus de sièges (136 au total). Il semble toutefois difficile pour le parti de droite conservatrice de former une majorité absolue (un total de 176 sièges est nécessaire). En effet, le PP ne dispose que de très peu d’alliés : le parti de droite radicale, Vox, qui a perdu du terrain par rapport aux élections de 2019 avec seulement  33 sièges, ainsi que deux représentant‧e‧s de partis régionaux partageant les mêmes idées (UPN et Coalición Canaria). En déclarant dès le début leur volonté de s’associer à Vox, le PP a perdu l’éventuel soutien des formations régionalistes pour qui cette alliance est rédhibitoire.

De l’autre côté de l’échiquier politique, c’est donc le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) qui se trouve dans la meilleure position. Avec 122 sièges récoltés, le parti de l’actuel chef de gouvernement Pedro Sánchez a déjoué tous les pronostics en augmentant même son nombre de député‧e‧s par rapport aux scrutins de 2019, tandis que le parti Sumar a lui obtenu 31 sièges.

C’est donc contre toute attente que la coalition de gauche pourrait répéter la législature précédente, mais avec davantage de difficultés et pas à n’importe quel prix.

 

Une coalition de gauche dans l’impasse

Pour aller chercher les 23 sièges restants afin de former une majorité, l’alliance PSOE/Sumar (153 sièges) devra encore chercher des allié‧e‧s. Il ne sera a priori pas difficile d’obtenir le soutien des partis régionaux, leurs alliés traditionnels au Parlement (ERC, Bildu, PNV, BNG). Mais ces derniers ne disposent que de 19 sièges. C’est donc le parti catalan (Junts), dirigé par Carles Puigdemont, qui sera décisif dans l’équation. Mais ce n’est pas aussi facile : le parti séparatiste catalan ne dispose pas d’autant d’intérêts de former une coalition avec le PSOE et Sumar et n’acceptera de collaborer que s’il obtient des garanties, et pas n’importe lesquelles : un référendum d’indépendance pour la Catalogne, et l’amnistie de l’ensemble des personnes inculpées après le référendum de 2017.

Pedro Sánchez est donc dans une impasse : il doit faire des concessions à Junts, mais il n’a plus grand-chose à offrir (il  a déjà offert une grâce partielle aux prisonnier‧ère‧s catalan‧e‧s et la réforme du délit de sédition lors de la précédente législature), et offrir l’amnistie à Puigdemont pourrait être mal perçu par la droite et la société espagnole.

Lui qui a toujours refusé l’idée d’une indépendance de la Catalogne se trouve dans une situation assez délicate, ce qui pousse les spécialistes à penser que la solution la plus probable serait l’organisation de nouvelles élections. C’est un vrai casse-tête politique dans lequel est plongée l’Espagne aujourd’hui.

 

L’extrême droite en vogue dans toute l’U.E.

Les alliances entre la droite et la droite radicale se font de plus en plus nombreuses : Ulf Kristersson est devenu premier ministre suédois après un accord de confiance avec le parti nationaliste démocrate, Giorgia Meloni, à la tête du Parti Fratelli D’Italia (aux racistes néofascistes) est entrée à la tête du gouvernement italien. Le parti populiste finlandais est également entré dans la coalition conservatrice de Petteri Orpo. Les exemples de montée des extrêmes en Europe sont nombreux et inquiétants. Cependant, Vox se distingue particulièrement des autres partis d’extrême droite européenne, de par ses origines et son discours. Il reste donc à savoir si la gauche parviendra à rester au pouvoir, ou si de nouvelles élections ne mèneraient pas à rompre l’équilibre actuel.

On peut donc se réjouir des résultats des élections générales espagnoles, ces événements refroidissant quelque peu la montée constante des partis de droite radicale observée ces derniers mois partout en Europe. C’est un échec pour les alliances entre la droite et la droite radicale, alors que l’alliance entre le PP et Vox était considérée par les spécialistes comme une étape d’une collaboration plus large entre le Parti populaire européen et le groupe des Conservateurs et réformistes européens en vue des élections européennes de 2024. Il s’agit donc d’une première victoire pour la démocratie européenne.

Mais il reste donc plus de questions que de réponses après ces élections : aura-t-on droit à de nouvelles élections, ou le PSOE parviendra-t-il à convaincre les partis régionalistes ? Si oui, à quel prix ? Quelle suite pour les alliances entre droite et droite radicale en Europe ?

Une situation tendue pour le pays qui occupe actuellement la présidence tournante du conseil de l’UE. On craint aujourd’hui que le gouvernement espagnol ait du mal à se concentrer sur les questions européennes et que des actes clés de l’Union Européenne soient bloqués par leurs troubles internes.

 

Sources :

 

 

– Article rédigé par Dorian Smets, membre du GT Europe d’écolo j

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