Retour sur | Enjeux climatiques internationaux, quels leviers d’action du Nord au Sud ?

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C’est un fait, l’évolution du climat de notre planète nous concerne et nous inquiète à différents degrés. La grande conférence sur les enjeux climatiques internationaux proposée par écolo j ce 30 janvier à Liège , en partenariat avec le CNCD-11.11.11, UniverSud et le CEISHS, nous a permis de faire le point sur cette question avec Arnaud Zacharie (CNCD-11.11.11.), Jean-Pascal van Ypersele (UCL, vice-président du GIEC) et Philippe Henry (Ministre wallon de l’environnement). Et la salle comble de l’ULg n’oubliera probablement pas les mots de la fin de nos invités : « Gardons notre enthousiasme et notre optimisme, on le changera, ce monde ! ». Retour sur la conférence…

En guise d’introduction à la soirée, Sarah et Augustin -délégués d’écolo j à la COP19  qui s’est déroulée à Varsovie en novembre 2013- nous ont présenté leurs témoignages, au nom du groupe. écolo j était en effet présent dans le train « Climat & Justice sociale » pour rejoindre la grande manifestation internationale et pour revendiquer 4 objectifs : soutenir la réduction effective des émissions de CO2 et atteindre les objectifs fixés, soutenir la concrétisation du fonds vert, maintenir la pression et insister sur la solidarité intergénérationnelle.

La vidéo tournée et montée par Fleur, autre déléguée écolo j, a présenté avec humour les raisons pour lesquelles les participant-e-s écolo j et ceux issus d’autres associations étaient présents à bord du train. Sur la manifestation proprement dite et les résultats de cette COP19, nos délégués se sont montrés déçus face au peu de sérieux et au peu d’importance que la présidence polonaise a accordé à cette COP19 qui a été surnommée « COP des entreprises ». En effet, pour la première fois, celles-ci étaient conviées à la table des négociations. Un sommet du charbon était même organisé en parallèle. Difficile dans ces conditions d’aboutir à de réels engagements en faveur du climat.

Après cela, place à la conférence avec nos trois intervenants. Introduite et animée par les coprésidents d’écolo j, Caroline et Guillaume, la conférence a commencé par le feed-back de nos invités sur cette introduction. Avec 17 participations à des COP à son actif, J.-P. van Ypersele (UCL, vice-président du GIEC) dit comprendre la frustration des jeunes, d’autant plus que le GIEC [3]a abondamment démontré que ce sont bien les activités humaines qui sont responsables à plus de 95% du réchauffement climatique. Pour Arnaud Zacharie (CNCD-11.11.11.), la contrainte climatique est aussi une opportunité pour créer un nouveau modèle de société susceptible de créer de nouvelles formes d’emplois et de prospérité. Enfin, Philippe Henry salue l’importance de l’action militante sur ces questions et souligne que Copenhague était un espoir énorme il y a 5 ans. Il faut bien se rendre compte qu’une machine pareille, qui associe les pays du monde entier, est extrêmement complexe et peu donc décevoir. Cela n’empêche pas les choses d’avancer lentement.

« Une vérité qui dérange »

Alors que le premier volume de 1552 pages du dernier rapport du GIEC a été mis en ligne ce 30 janvier 2014, J.-P. van Ypersele rappelle que ce sont bien les activités humaines qui sont responsables à plus de 95% du réchauffement climatique. A l’instar du titre du film d’Al Gore (« Une vérité qui dérange »), J.-P. van Ypersele rappelle que des solutions existent et qu’il est possible d’agir, mais que les freins restent cependant nombreux. En Europe par exemple, on dépense chaque année 400 milliards d’euros pour acheter des combustibles fossiles à l’extérieur du continent ! Il rappelle que le rôle du GIEC n’est pas de donner des instructions aux pays : il est au service des décideurs politiques du monde entier en fournissant des informations scientifiques et neutres.

Clivages Nord-Sud

Auparavant, dans les négociations, il y avait deux blocs bien distincts entre pays du Sud et pays du Nord. Cette distinction tend à s’estomper pour aller vers une distinction entre les pays qui bloquent les négociations et ceux qui les facilitent. Comment faire pour entendre tous ces pays qui ont des réalités économiques et des revendications tout-à-fait différentes ? Selon A. Zacharie, les pays émergents (Brésil, Inde, Chine…) deviennent de gros émetteurs de gaz à effets de serre car ils ont adopté pour se développer économiquement les mêmes paradigmes de développement que les pays du Nord (révolution industrielle).

La question environnementale est une question éminemment sociale. Si l’on prend les 10 pays les plus riches et les 10 pays les plus pauvres de la planète, on remarque qu’ils connaissent un nombre de catastrophes naturelles équivalent, mais qu’il y a 10 fois plus de victimes dans les pays pauvres parce qu’ils n’ont pas les mêmes capacités d’adaptation : « Varsovie devait être le sommet de l’adaptation aux changements climatiques dans les pays pauvres, ça n’en a rien été ». Arnaud Zacharie estime que pour aboutir à un accord Nord-Sud planétaire, il faut aboutir à la création d’un fonds vert et créer de nouvelles formes de prospérité, de technologie et d’emploi. De nouveaux paradigmes de production et de consommation doivent être mis en place, ainsi que la nécessité de rendre plus coûteuses les activités polluantes.

Quelles alternatives à ces grands sommets annuels ?

Pour J.-P. van Ypersele, s’ils sont très frustrants, ces sommets sont absolument nécessaires car l’objectif de ne pas dépasser une augmentation de température de 2° vient d’une décision politique prise à Copenhague en 2009. Il faut une participation maximale et globale de tous les acteurs mondiaux (tant étatiques qu’issus de la société civile), car l’atmosphère est actuellement utilisé comme une poubelle gratuite et il faut mettre fin à cette situation. Pour le moment nous ne payons rien pour le fait de déposer nos déchets dans l’atmosphère : c’est invisible et les conséquences de nos actes ne sont pas directement tangibles. Comment faire si cette donnée aussi fondamentale ne change pas ? Et comment serait-il possible de prendre une décision comme celle-là sans prendre du temps ?

Philippe Henry est lui aussi totalement convaincu de la nécessité de ces COP car c’est la seule manière d’avancer, même si le processus est lent et souvent décevant. Ces sommets permettent également de tisser des liens entre États et acteurs internationaux pour contribuer aux négociations. Il évoque le projet « Fast Start » du gouvernement wallon qui a permis de dégager 10 millions d’euros pour développer des initiatives concrètes en Afrique (la conception de fours ménagers moins énergivores par exemple).

Pour Arnaud Zacharie, il est nécessaire de prendre maintenant des décisions politiques dont la majorité des effets se feront ressentir dans les décennies à venir.

Impossible de détailler ici tout le contenu du débat, mais si tu veux approfondir le sujet, tu trouveras ci-dessous le compte-rendu complet de la conférence.

Après ce riche débat et les questions du public, les participants se sont retrouvés pour un verre afin de prolonger les discussions autour des stands d’écolo j, du CNCD-11.11.11 et d’UniverSud.

Merci à nos intervenants, Arnaud Zacharie, Jean-Pascal van Ypersele et Philippe Henry pour les échanges très riches !

Retrouve le Compte-rendu complet de la conférence en format PDF

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