Lutte contre la précarité énergétique

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On en discute avec le RWADE et la tutrice en énergie d’un CPAS

Si tous les Belges ont droit à une vie digne, ils ont aussi droit à un accès à l’énergie ! écolo j a accueilli Laurence Urger, tuteur en énergie au CPAS de Floreffe et Aurélie Ciutti, du RWADE (Réseau Wallon pour l’Accès Durable à l’Energie) pour aborder la question de la précarité énergétique et des initiatives mises en place pour lutter contre cette problématique dont on parle peu.

La plupart des personnes qui contactent un tuteur en énergie comme Laurence le font suite à une grosse facture de régularisation d’eau ou d’électricité. L’objectif premier du tuteur est d’aider les gens à comprendre ce qui leur arrive. D’où vient cette facture supplémentaire, comment est-ce que tout ça est calculé ?

Première étape : une mise en ordre administrative. Est-ce le bon compteur ? Le relevé d’index et-il correct ? etc. Il arrive régulièrement que les factures comportent des erreurs. Si ce n’est pas le cas, Laurence aide les personnes qui s’adressent à elle à gérer un plan de paiement avec leur fournisseur. À celui-ci s’ajouteront des mensualités plus élevées, suite à cette régularisation. La charge financière peut s’avérer extrêmement lourde. Laurence en profite donc également pour vérifier que ces personnes bénéficient du contrat optimal avec leur fournisseur, en fonction de leur consommation.

Pour gérer la consommation et avoir une meilleure prise sur ses factures, Laurence instaure avec le consommateur un relevé mensuel des indexes. Cela permet de s’assurer que tout va bien. C’est particulièrement important au niveau de l’eau car il y a souvent des fuites et donc une consommation inutile. Ensuite, elle discute avec la personne des économies possibles d’énergie, tant en ce qui concerne les équipements, que des comportements. Les tuteurs en énergie ont, dans certains cas, un petit budget pour acheter de petits appareils économiseurs d’énergie tels des minuteurs ou des ampoules économiques. La plupart du temps, cependant, l’équipement du logement ne permet pas aux locataires de faire les investissements nécessaires pour améliorer leur situation. La situation est bien entendu très différente d’un ménage à l’autre.

Les compteurs à budget sont avant tout un moyen à disposition des fournisseurs pour éviter les impayés mais c’est également une autre manière d’avoir un œil sur sa consommation. Cependant, celui-ci peut également résulter en des comportements de privation et ne permet pas d’avoir des informations quant à la situation de précarité énergétique dans laquelle peut se trouver un consommateur. Celui-ci est alors un outil d’exclusion sociale et le problème de la précarité énergétique est renvoyée dans la sphère privée.

Les compteurs à budget coûtent 60 millions d’euros à la société pour 14.000 compteurs en électricité et environ 7-8.000 compteurs gaz. Cela comprend le placement, les frais de rechargement, etc. On pourrait faire autre chose avec cet argent et apporter des réponses structurelles. À Bruxelles, ce système est inexistant. Lorsqu’un fournisseur se plaint des difficultés de paiement d’un consommateurs, il entame une procédure qui passe par le juge de paix, ce qui permet d’objectiver les droits et les devoirs des fournisseurs.

Aurélie Ciutti nous présente le RWADE. Il s’agit d’un réseau associatif qui œuvre pour tous les consommateurs belges d’énergie, pas uniquement les consommateurs précarisés. Le politique doit pouvoir simplifier la vie des gens. Être consommateur n’est pas un boulot à temps plein. Le secteur énergétique est fort empreint de responsabilité individuelle. Au niveau des primes aux travaux économiseurs d’énergie par exemple, la logique est individuelles : qui a les moyens de faire ces travaux reçoit en plus une aide de l’État. Or, la collectivité gagnerait à ce que tous les ménages soient logés dans des logements peu énergivores : cela contribuerait au développement économique, diminuerait les problèmes de santé, etc. Le RWADE demande, par exemple, à ce que cette logique passe d’une logique individuelle à une mise en œuvre à l’échelle d’un quartier.

L’association accorde une attention particulière à ce que tout le monde reste sur le même réseau. Les propriétaires de panneaux photovoltaïques par exemple, ne participent plus au financement du réseau et au coût de solidarité alors que, en prenant et rendant constamment de l’énergie au réseau, ils utilisent encore plus les infrastructures énergétiques communes. La solidarité énergétique passe par le réseau. Il est important que tous les consommateurs d’énergie y contribuent.

L’augmentation de la part de renouvelable dans le bouquet énergétique belge a comme conséquence que la production est de moins en moins constante. Adapter sa consommation en fonction de la production n’est pas toujours souhaitable. Les compteurs intelligents, qui reçoivent et émettent constamment des informations sur la consommation globale et sont capables de déclencher des électroménagers en fonction de la disponibilité de l’énergie, posent notamment question quant au respect de la vie privée et de l’utilisation qui pourrait être faite des données envoyées au réseau. Un relevé de compteur mensuel est déjà très intrusif et permet d’en savoir beaucoup sur la vie de quelqu’un. Il est donc primordial d’avoir une réflexion collective sur la manière de répondre à ces nouveaux enjeux.

Tant Laurence qu’Aurélie insiste sur un point essentiel : il est urgent de faire comprendre aux gens qu’il faut sans tarder changer nos modes de consommation et mettre en place des changements durables de comportements et d’infrastructures pour diminuer notre consommation énergétique… Une manière de lutter, tant pour préserver les ressources de notre planète que pour lutter contre la précarité énergétique.

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