L’été 2021 restera sans aucun doute l’un des plus tristement célèbres qu’aura connu la Belgique durant la décennie 2011-2021. En effet, pendant la semaine du 12 juillet 2021, la Belgique est frappée par des niveaux de précipitations historiques qui causent rapidement des inondations extrêmes. Si les régions bruxelloises et flamandes en subissent de moindres conséquences, la région wallonne quant à elle est particulièrement impactée. 209 communes sur les 262 que comptent la région wallonne sont gravement touchées et les dégâts matériels sont considérables. Entre autres, 31 564 logements, 2 624 bâtiments d’entreprises, 185 installations sportives, 119 écoles et 58 bâtiments administratifs communaux sont atteints (et parfois dévastés) par les eaux, environ 50 000 véhicules sont endommagés et 96 kilomètres de voiries locales sont détruites. Par ailleurs, la population est directement touchée puisque quelque 100 000 personnes sont sinistrées et 39 victimes perdent la vie à cette occasion.
Il est important de souligner que durant la même période, dans d’autres régions du globe, des inondations ont provoqué des dégâts similaires notamment en Chine, en Inde, aux Philippines et aux Etats-Unis,… On estime que les inondations sont la catastrophe naturelle la plus meurtrière de la planète. Au cours du XXe siècle, on estime à près de 3,2 millions, le nombre de personnes ayant perdu la vie à la suite d’inondations. Ce qui représente un plus de la moitié des victimes de catastrophes naturelles au cours de la même période.
C’est donc un phénomène global dont les origines et les causes méritent d’être questionnées. Mais avant, il semble nécessaire de d’abord s’interroger sur la notion même d’inondation afin de mieux l’appréhender.
L’inondation : qu’est-ce que c’est ?
Une inondation peut être définie comme une occupation massive par l’eau de zones auparavant sèches. Entre autres facteurs pouvant conduire à des inondations, on peut retenir les hausses temporaires du niveau d’une rivière, d’un lac ou de la mer. Pour le GIEC, il s’agit de la « submersion par l’eau débordant du lit normal d’un cours d’eau ou d’autres masses d’eau, ou [l’]accumulation d’eau sur des zones qui ne sont pas normalement submergées ». Bien qu’elles soient parfois inévitables, les inondations sont parfois des situations qui peuvent être contrôlées par l’activité humaine, par le biais d’une mauvaise utilisation des terres à proximité des cours d’eau.
Les différents types d’inondations…
- Les inondations fluviales ont lieu lorsque le cours d’eau sort de son lit mineur et occupe son lit majeur, ce qui inonde les terrains avoisinants. Ce type d’inondation est dû à des précipitations d’intensité modérée mais de longue durée, ce qui induit d’importants volumes d’eau.
- Les inondations pluviales sont des « des inondations causées par de fortes pluies où l’eau qui, ne s’infiltrant pas dans le sol, va s’accumuler dans des creux artificiels ou en ruisselant sur le sol avant d’être récupérée dans un système de drainage ou dans un cours d’eau naturel (ou créé par les humains), si toutefois ces systèmes ne sont pas saturés » selon l’European Water Association (2009). Ces inondations sont dues à de fortes intempéries sur un laps de temps court ; elles vont générer un fort ruissellement qui pourra s’accumuler dans des zones éloignées des cours d’eau. Ces événements sont difficiles à prévenir et causent des dommages multiples dans des zones qui, souvent, ne sont pas préparées.
- Les inondations côtières ont lieu dans les basses terres qui sont inondées par l’eau de mer. Ce phénomène est principalement dû à des conditions météorologiques ou océaniques défavorables. C’est en particulier le cas aux Pays-Bas comme lors des grandes inondations de 1995 qui ont provoqué l’évacuation de 250 000 personnes.
- Les inondations par remontée des nappes phréatiques : Les nappes sont alimentées par les eaux de pluie. Lors de fortes précipitations, le niveau de la nappe augmente jusqu’à atteindre le niveau de la surface du sol.
…et leurs causes
Les principales causes des inondations sont multiples. Il n’y a aucun doute, les causes des inondations sont naturelles, mais peuvent généralement être aussi classées comme la conséquence de l’activité humaine. Nous n’allons donc pas nous attarder sur les causes naturelles qui sont entre autres : l’accumulation de sédiments, la fonte de la neige en haute montagne, les tsunamis, les fortes précipitations, etc. Il est plutôt question ici de mettre en exergue les causes humaines des inondations qui sont le résultat de notre activité sur la planète.
Le World Weather Attribution (WWA), composé par plusieurs climatologues spécialisé·es en changement climatique, a confirmé une relation de causalité entre la hausse de concentration de gaz à effet de serre (causée par l’homme) et les orages qui causent les inondations.
La question des inondations est aussi strictement liée à sa némésis antipodique : la sécheresse, elle-même exacerbée par le réchauffement climatique. Inondations et sécheresse sont deux faces de la même monnaie : la monnaie de la catastrophe. Ces deux événements apparemment contrastants se présentent en réalité souvent ensemble, avec des vagues de chaleur qui précèdent les inondations.
Les êtres humains rendent les inondations plus probables aussi à travers des choix locaux, notamment des choix urbanistiques. La croissante bétonisation occupe l’espace des terrains qui devraient absorber la pluie, ce qui intensifie les effets des précipitations météorologiques. Il va de même pour l’agriculture intensive, qui rase les forêts et appauvrit les sols, ce qui limite leurs capacités d’absorption de l’eau en cas de crue ou forte pluie.
Parmi les causes liées à l’activité humaine, on peut aussi recenser : la destruction des canaux d’eaux, la ruptures de barrages ou de digues, le déversement d’ordures ou de matériaux qui obstruent le lit des rivières…
Les changements climatiques
Les changements climatiques peuvent être considérés comme une cause, certes indirecte mais cependant très néfaste, des inondations dans la mesure où ils résultent de l’hyperactivité humaine sur la biosphère et agissent comme un accélérateur de tous les autres processus qui sont à l’origine des inondations.
Le GIEC a publié le 28 février 2022 le rapport « Impacts, adaptation et vulnérabilité », qui décrit les conséquences du changement climatique sur les sociétés humaines et les écosystèmes de toutes les régions du monde, ainsi que les pistes d’adaptation et leurs limites. Le constat de ce nouveau rapport est sans appel : les impacts du changement climatique ont des effets néfastes importants sur la nature et les populations dans toutes les régions, affectant particulièrement les plus vulnérables, et les mesures d’adaptation déjà en place sont loin d’être suffisantes.
127 risques majeurs ont été recensés dans toutes les régions et tous les secteurs : avec l’augmentation du réchauffement, ils deviendront graves, c’est-à-dire généralisés, systémiques et potentiellement irréversibles. En ce qui concerne l’Europe, le GIEC a recensé 4 risques clés dont les inondations.
Des conséquences multiples
Les faits que nous avons relatés au début de notre article montrent à juste titre que les conséquences des inondations peuvent aussi bien être pour la nature que les humains. Elles peuvent donc être à la fois économiques, environnementales et sanitaires.
Pourtant des solutions existent…
Selon le GIEC, nous disposons collectivement d’assez de connaissances, d’outils et de capitaux mondiaux pour relever ce défi, avec un rôle crucial pour les gouvernements et l’implication de la société civile.
Il s’agit de réduire les émissions de gaz à effet de serre à l’échelle du globe, sortir des énergies fossiles et investir dans les renouvelables, adopter une attitude sobre pour réduire la demande, protéger les sols, sortir du modèle de l’agriculture intensive, s’adapter et mettre sur pied une véritable gouvernance inclusive et avec une coopération au niveau international.
– Article rédigé par João Pedro Antonucci Rezende et Sergeot Amba
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